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L’art de poser les bonnes questions

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Pas de créativité sans bonne question. C’est la question qui ouvre et structure toute recherche créative, quel que soit le domaine dans lequel on opère.

Pour Raymond Lévy, “il faut savoir poser les questions qui déboulonnent les certitudes“.

La puissance créatrice des contraintes

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Passionnant chapitre consacré aux contraintes dans le livre-dialogue du mathématicien Cédric Villani et le compositeur Karol Beffa “Les coulisses de la création”. Pour ces deux monstres de créativité, “les vertus des contraintes pour la créativité” sont évidentes (CV, p.149). “Pas de créativité sans contraintes !” (CV p.151). “Il y a les contraintes qui s’imposent, et celles que l’on s’impose; les contraintes de forme et les contraintes de temps” (KB, p. 156).

Les contraintes que le créatif s’invente sont des “défis”. Ravel était un maître en la matière, il s’inventait des difficultés qui le forçaient à aller au-delà de l’évidence. Karol Beffa cite aussi l’étude pour piano de Ligeti qui n’utilise que les touches blanches (KB, p. 155).

P.S.: en allant vérifier l’étymologie du mot contrainte ce matin, je lis qu’il s’agit à l’origine d'”empêcher quelqu’un de suivre son penchant naturel“. Aussi inventez-vous de belles et fortes contraintes qui vous amèneront à chercher où votre nature ne vous aurait pas amené.

A lire : BEFFA Karol et VILLANI Cédric, Les coulisses de la création, Paris, 2015, pages 143-171.

Journée d’anniversaire créative

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A quoi sert votre journée d’anniversaire ?

Il se fait que je suis né un 10 janvier. Enfant de l’hiver, mais conçu au printemps.

C’est l’occasion de me demander à quoi sert la journée d’anniversaire ? Réjouissances – festives ou sobres, selon son tempérament – avec les membres de la famille et quelques amis proches. Conversations joyeuses avec des copains ou des fréquentations. Pensées légères et indulgence vis-à-vis de soi-même. Aussi inquiétude due au temps qui passe, surtout qu’il passe de plus en plus vite. Du moins en a-t-on l’impression quand on avance en âge.

La journée anniversaire peut aussi être un moment privilégié pour visiter l’année écoulée et se projeter dans l’avenir. Et ainsi, de laisser libre cours à sa créativité.

Visiter l’année écoulée : qu’ai-je réalisé d’important ? Qu’est-ce qui m’a réjoui, étonné, enchanté ? Quelles furent mes belles réalisations, mes intenses satisfactions, ainsi que les changements que j’ai apporté dans ma vie ? S’interroger sur les autres : quelles furent les chaleureuses amitiés, ainsi que les rencontres inattendues ? Quelles furent mes déceptions, échecs et faiblesses ? Quels ont été les cadeaux et surprises de ces douze mois qui se sont achevés hier ? Dans cette réflexion intime, il est bon de prendre une posture de spectateur bienveillant vis-à-vis de soi-même : se regarder traverser l’année écoulée avec indulgence et curiosité. On essaie d’entrevoir ce qu’on n’a pas perçu dans le flot des actions et des émotions. Il est bien de prendre quelques notes au passage. On peut terminer cette visite en se demandant quel serait son nom, son slogan, sa couleur ? 2017 fut pour moi une année jaune intense avec la découverte de nuances de cette couleur lumineuse que je ne connaissais pas ou que j’avais oubliées. Un beau cadeau.

L’anniversaire est aussi une occasion de se projeter dans le futur, proche et plus ou moins lointain, et ainsi de laisser vagabonder son imagination et sa créativité. J’aime bien penser à trois ans : c’est mille jours et en un bon millier de journées et de nuits on a vraiment le temps de travailler sur des idées et des projets nouveaux, même impossibles. On a le temps d’apprendre des approches et des techniques émergentes, de mettre en place des habitudes créatives nouvelles, de faire les rencontres nourricières indispensables, de commettre des erreurs et de se fourvoyer pour trouver finalement la bonne direction. S’il faut donner du temps au temps, il faut également en donner énormément à ses rêves et projets.

Pour mes trois années à venir, trois grands chantiers passionnants me semblent évidents. Il est déjà temps d’en écrire les plans d’action. Parce que la journée d’anniversaire, c’est aussi l’occasion de se demander ce qu’on aimerait faire, comment on va le faire et surtout quand et avec qui on le fera. Et de se rappeler cette phrase du sculpteur roumain Constantin Brancusi : « Les choses ne sont pas difficiles à faire, ce qui est difficile, ce de nous mettre en état de le faire ».

Depuis des années je ne travaille pas le jour de son anniversaire : c’est un jour qui m’appartient totalement. C’est ma journée d’anniversaire créative. Je n’ai jamais regretté cette décision. Je me demande même de plus en plus si je ne devrais pas prendre la décision – définitive – de ne plus jamais travailler la semaine de mes prochains anniversaires. Voilà déjà une très bonne idée pour fêter mon anniversaire de grand matin.

L’ennui, moteur de votre créativité

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Ennui et créativité sont deux mots qui sont rarement associés. Ils seraient même opposés.

« L’ennui fait partie de mon travail. Je l’accepte et je l’accueille volontiers » défend l’investisseur et l’essayiste américain Paul Graham *, auteur de « Hackers & Painters: big ideas from the Computer Age ».

La créativité est souvent associée à la liberté, à l’originalité, à la fantaisie, voire à la l’impulsivité et à la frivolité. Etre créatif, c’est – pour tout un chacun – avant tout s’amuser, jouer, se divertir, avec intelligence et vision de préférence.

Un créatif n’est-il pas avant tout une personne qui fait tout de manière différente, décalée, surprenante ?

Ce serait toutefois une grande méprise et une lourde illusion de croire que la vie créative est un long fleuve agité, pour lequel chaque méandre ne serait qu’excitations, défis et nouveautés délirantes. La vie créative consiste à œuvrer avec patience. Elle exige concentration et détermination. Nombreux sont les artistes, chercheurs, scientifiques et innovateurs qui confient que leur existence est pleine de doutes, de déceptions, d’erreurs, d’échecs et de désir d’abandon. Il y a beaucoup plus de pages abandonnées que de pages publiées dans la vie d’un écrivain, beaucoup plus d’expériences ratées et non-concluantes dans les laboratoires que de succès éclatants, beaucoup plus d’idées nouvelles infructueuses que de pépites géniales dans les carnets à idées de l’innovateur. Beaucoup plus !

Mais Léonard de Vinci, me diriez-vous ? Et ses carnets ne sont-ils pas la preuve que l’on peut être génial sur la durée ?

Oui, bien sûr, et le grand maître le fût assurément. Mais sa vie a été jalonnée de mille interrogations. Elle fut faite d’errance. Il a abandonné de très nombreux projets importants ; plus d’une fois il s’est fourvoyé dans des aventures foireuses. Les conflits avec ses mécènes et commanditaires furent nombreux, parfois violents. Ce qui caractérisait le génial Toscan, c’était avant tout un subtil mélange.

Un très subtil mélange de curiosité, de ténacité et un grand sens de l’observation. Léonard de Vinci avait avant tout une ouverture sur le monde exceptionnelle.

Aussi pour booster votre créativité, cultivez certes votre folie personnelle, poursuivez vos rêves les plus fous. Mais surtout armez-vous de courage, de patience, d’enthousiasme et de générosité dans l’action.

Et acceptez l’ennui, la routine, car la routine créative est un élément du succès.